LES TAMANGS DE RASUWA

Ascension facultative d’un 5000  à la clé !

 

 Un itinéraire original et intéressant s’étageant de 1400 à 5000 malt, déclinable du niveau moyen à sportif ++ selon les étapes et les multiples variantes choisies. La première partie se déroule dans une zone très peu fréquentée ouverte au tourisme depuis 2007 sous le nom de TAMANG HERITAGE TREK ( district Rasuwagadi). L’accueil est couleur locale dans les hameaux qui comptent peu de lodges. La seconde partie peut s’imaginer soit vers les lacs sacrés de Gosaïkunda ( cf : récit du séjour LANGTANG / GOSAIKUND avril 2010) soit, et ce fût cette fois mon choix, dans la somptueuse vallée de la Langtang khola, plus connue du tourisme. Cet itinéraire a l’avantage de permettre l’ascension facultative d’un 5000 mètres d’accès aisé, le Tsergo Ri. Il aura aussi eu le mérite de satisfaire notre curiosité par une échappée, et non des moindres, jusqu’à la frontière chinoise.

              les sommets des Ganesh                                                   femme Tamang en tenue traditionnelle

 

                                                  J1  PATIENCE ET LONGUEUR DE TEMPS

 

De la capitale à Syabrubensi ( 1460m) pas moins de 10 heures de bus et quelques imprévus. Peu après le départ, le bus casse une main de ressort de suspension ( c’est pas moi qui le devine … c’est Roland, que notre porteur appellera d'ailleurs « technical baje »). Le spectacle était dans le bus, il est désormais sous le bus. La pièce finit par être livrée sur place et le bus réparé. Plus rapide que la Poste, plus rapide qu'Amazone, plus souriant, plus photogénique. Nous chargeons et déchargeons passagers et provisions dont deux chèvres qui voyageront dans la soute à outils. Une véritable page de la vie quotidienne.            

 

 

                                        J2 : TATOPANI, OUI MAIS VRAIMENT TATO

                      Syabrubensi ( 1460) / Pajung ( 1900)/ Tatopani ( 2280) / en 5hs.

 

 Faute de temps nous ne ferons pas étape dans le très beau village tamang de Galtang, dont la visite reste recommandée. Nous empruntons sur quelques centaines de mètres la piste qui monte vers les mines de plomb et zinc de Somdang, puis bifurquons à gauche après le check post pour monter directement à Pajung ( 2h30).

Là, les locaux ne parlent souvent que leur dialecte, le tamang. Un homme fera sa lessive aux pieds tout le temps qu’il nous faudra pour déguster notre premier thé du trek. Le tavernier nous présente une grenouille desséchée exposée sur la cheminée, et aussi plate qu’un pancake : «  medecine ». Je réplique aussitôt que je me porte très bien ! La plupart des végétaux, le sang de yak, l’ail, et surtout l’eau chaude, tout est « medecine ». Il y a décidément beaucoup de gens malades dans ce pays …

De Pajung une traversée de plus en plus ascendante conduit en 2h30 à Tatopani dans les champs d’orge. En face, Goljung, en bas Chilime avec son lac de barrage. A Tatopani, un bain ( «  medecine » ) dans les eaux thermales très chaudes clôture notre première journée de trek. Tatopani, en effet, signifie eaux chaudes.

 

                                       J3 : ON Y VA  / ON Y VA PAS  / ON Y VA

Tatopani ( 2280) / Nagthali ( 3150) en 2h45 / Thuman ( 2125) en 2h15 / Timure ( 1710) en 3h)

 

 La montée au point de vue de Nagthali, ancien lieu de retraite et de méditation des lamas, est régulière. De ce très bel alpage le Paldor ( 6011) et les Ganesh se dévoilent, à l’opposé le Langtang Lirung  ( 7200) qui nous deviendra familier. Nagthali compte 3 lodges rudimentaires où une nuit méditative sous les étoiles serait envisageable. Une descente abrupte dans une forêt de rhodos en fleurs mène à Thuman ( 2125)  annoncé par ses champs d’orge. La fête à la gompa ne nous retiendra pas, j’ai trop insisté auprès de Pasang ( son nom signifie « vendredi » et en plus, c’est vrai ! ) pour poursuivre jusqu’à Timure ( 1710), avant dernier village avant la frontière chinoise. On nous annonce 2h, il en faudra donc 3.Deux étapes en une, pardon Tendi, on ne le refera plus ( quoi que …).

 

 

                                          J4 : AU TIBET MYTHIQUE NOUS VOILA

Timure ( 1710) / Ngadi ( 1750) en 45mn/ Timure en 45mn / Briddhim ( 2210) en 4h.

 

 Nous empruntons la route en construction qui depuis deux mois permet de relier la frontière chinoise depuis Syabrubensi, en 15kms, direction Kyirong ( Chine ). A la frontière, un immeuble blanc rutilant neuf de 4 étages dérange la vue dans ce décor de nature et de rusticité : un mirage ? «  les baraquements de la police chinoise » expliquent les policiers Népalais qui, eux,  suent à grosses gouttes sous une tôle rouillée mal soutenue par quatre piliers. Les photos ne sont autorisées que du côté népalais, ajoutent-ils avec humour. Je capte leur attention avec quelques questions dans mon mauvais népali, tandis que Stéphanie, espion secret, photographie le côté défendu.

La construction de cette route utilise des moyens plus sophistiqués que celle des Annapurnas, creusée à la petite cuillère. Le tracé semble plus évident, l’altitude indéniablement plus basse.

De retour à Timure, nous longeons encore la route vers aval avant de bifurquer à gauche pour monter raide à Briddhim ( 2210) en 4h avec une pause lunch dans un lodge accroché à flanc de coteau. Nous logerons dans un véritable intérieur tamang /sherpa, avec dégustation de « churpi » (fromage sec),  momos, et thé tibétain obligatoire.

La frontière avec la Chine est vraiment trop moche, je préfère vous montrer notre intérieur dans le lodge du soir. 

 

                                            J5 : "MADE IN CHINA IS NOT GOOD"

Briddhim ( 2210) / Khangjung ( 2230) en 1h / Sarku (2440) / passage à 2680 / Sherpagaon ( 2510) en 3h / Lama et Ghumnachok ( 2740) en 2h30

 

 Un très long sentier balcon traverse plusieurs hameaux tamangs. Depuis Sarku où un groupe d’artisans Indiens travaille à la construction d’un grand lodge, il n’y a plus aucun village jusqu’à Sherpagaon, mais une splendide montée dans une forêt de rhodos en fleurs, de fougères, d’orchidées parasites et de singes ( entelles à longue queue). Depuis le point haut ( 2680) , un très étroit sentier toujours balcon, et enfin la descente sur Sherpagaon. Après avoir persuadé Tendi, nous tentons notre chance pour Ghumnachock ( 2h30), évitant soigneusement de loger à Lama, le « Thamel » du Langtang. Le River Side est le seul lodge du lieu dit. Il est plein comme un oeuf, la nuit tombe, Tendi pas encore là. Le miracle se produit : un groupe de trekkeurs décide, malgré l’heure avancée, de poursuivre ( je comprendrai le lendemain pour quoi …) et libère le dortoir. Il est 18h30, la Langtang khola monte en décibels, Tendi finit par arriver. Nous nous installons avec les choux, le riz,  le PQ, et notre équipe dans le dortoir. « Made in China is not good » : Tendi a les pieds tout verts, ses chaussettes chinoises ont déteint. Ce sera son mot de la fin pour cette belle et longue étape.

                            la vue sur les Ganesh depuis notre lodge à Briddhim

 

                          J6 : LE NEPAL APPARTIENT A CEUX QUI SE LEVENT TARD

               Ghumnachock ( 2740) / Ghoratabela ( 3000) en 45mn/ Langtang ( 3330) en 2h

 

 

 On est passé du «  Demain départ 7h » des premiers jours  à «  Demain tu veux partir à 9h, c’est ça, Didi ? ». Oui, c’est ça. L’équipe y prendrait même goût. Du River Lodge en moins de 10mn nous voilà dans un lieu idyllique au Woodland Lodge, encore aurait il fallu le savoir la veille ...

Une maison de poupées dans une clairière, des rhodos fleuris, des iris nains, la Langtang khola plus sage le matin. Nous prenons le thé à Ghoratabéla ( 3000) avant de poursuivre sur Langtang ( 3330) . Les étapes sont volontairement plus courtes en altitude. Premières vues sur le Tsergo Ri ( 5000)  dont nous réussirons l’ascension, et le Gangchenpo ( 6387).

Langtang compte 65 foyers, une salle des fêtes, une coopérative  fromagère qui gère aussi l’électricité. Les familles payent 0,30 euro/mens/ampoule ! Seule la fromagerie dispose d’un compteur, car ses fours électriques consomment beaucoup d’énergie. Au Népal, la quasi totalité de l’énergie est hydroélectrique.

Il grêle : le tsunami du 11 mars aurait, aux dires de certains Népalais, perturbé les flux météos.

Ce village situé à une soixantaine de kilomètres de Katmandou à vol d'oiseau, a été englouti par un glissement de terrain suite au séisme d'avril 2015. Depuis, le réseau de sentiers a été refait et il faut absolument y retourner ! 

                                 Penzom, qui me reconnait quatre ans après ! 

 

 

J7 : LAISSER DIRE

Langtang ( 3330) / Kyangjin ( 3750) en 2h30

 

 Séance quotidienne de dissuasion : «  Impossible d’aller au camp de base du Langtang Lirung, il y a des avalanches, des morts, c’est dangereux, je connais, je suis de là bas ». Je ris au nez du lodge man, rassure Pasang notre guide ( …) ainsi que le groupe, et nous voilà partis. Ce sera notre journée la plus sauvage, et une des plus belles.

Tendi trouve un cheval pour porter les bagages à sa place. Je reconnais cette arrivée sur le fond de vallée, les manis, les drapeaux propres du Losar, la fromagerie et enfin le village. Penzom, elle, me reconnaît ! Nous nous installerons juste à côté, au souhait de notre équipe. Penzom se souvient qu’il y a 4 ans, avec Paulo, nous avions logé plusieurs nuits chez elle, et étions ensuite partis en autonomie pour le Tillman Pass malgré les forts avis contraires du village. Elle tient seule le lodge en l’absence de son mari ( dont je raconte l’histoire dans mon livre sous le nom de Tashi), et de ses deux enfants.  Elle ne sait ni lire ni écrire et le déplore. Elle a besoin de chaussures et je promets de m’en souvenir lors d’un prochain passage.  ( avis : c'est du 38 !).

Après une assiette de pâtes, nous montons au kharka de Chalepoch ( 4180) rive gauche de l’impressionnant glacier du Langtang Lirung ( 7200), faute pour moi d’avoir reconnu le sentier qui monte rive droite au CDB de ce même sommet. C’est une montagne technique, ambitieuse, impressionnante. Le site est sauvage, le glacier à portée de mains, les chevaux du vent flottent sur la moraine, les portes des kharkas sont fermées par des accumulations de pierres, la vue s’étend du Nayakang ( 5844) au Gangchenpo( 6837) en passant par le Ganga la ( 5300) : ambiance.

 

                                                                      J8 : NOTRE 5000

Kyangjin ( 3750) / Tsergo Ri ( 5000) en 3h30 / Kyangjin en 2h30 / Mundu ( 3410) en 1h20.

 

 4920 sur l’alti de Roland, 4984 sur ma carte, 5087 sur une autre, bref, pour nous peu importe, ce sera « notre » 5000 du séjour, la montée vaut bien cette altitude !  La cerise sur le gâteau de ce trek nouvelle mouture. 

Au retour, je laisse ma polaire à Penzom, puis malgré la pluie, la première pluie de journée du séjour, nous décidons de perdre de l’altitude pour mieux dormir. Au grand dam de l’équipe nous ferons halte avant Langtang à Mundu  ( 3410). « Typical » se moque Pasang, qui dans la cour essaye de se souvenir comment on monte un cheval.

 

Nous n'en avions pas forcément fait un objectif ... alors nous l'avons atteint ! BRAVO ! 

J9 : LE VILLAGE EN VIRGULE

Mundu ( 3410) / Rimchi ( 2440) en 4h de descente / Bamboo ( 1960) en 1h de descente / Thulo Syabru ( 2250) en 2h30 de montée.

 

Nous dévalons la quasi-totalité de l’impressionnante vallée du Langtang en une seule journée , et qui plus est nous nous offrons le luxe de remonter sur l’autre versant ! Tendi  arbore le même sourire charmeur : serait-il toujours content de nous avoir connus ? 8h de marche aujourd’hui. Hier, il a décollé de sa chaise quand Pasang lui a annoncé l’étape. Plus vite arrivés, plus vite au repos. Je pense qu'il aime à se challenger, et feint la difficulté, mais est toujours à courir devant.

Aujourd’hui, on change de pays et on change de saison. On passe de 5000 à 1960 mètres au-dessus du niveau de la mer. En trois jours la végétation a fait de son mieux dans le vert. La nature a ajouté cigales, papillons et essaims sauvages, intarissables auprès des eaux turquoises du torrent.

Après Pahiro ( littéralement «  glissement de terrain », ça promet ...), une plage au bord de la Langtang khola invite à la pause. Nous acceptons volontiers  l’invitation. Un tuyau amène de l’eau chaude soufrée, une chance pour ces messieurs qui d’emblée se déshabillent et se douchent plus chaud que jamais ( la seconde douche du séjour, précise « technical baje »).

        J10 : CONCERT POP A DHUNCHE : le Gosaïkund – Langtang – Rasuwa festival 2011.

            Thulo Syabru ( 2250) / Thulo Barkhu ( 1860) en 3h / Dhunche ( 1960) en 2h

 

 Le petit –dèj tardif sur la terrasse du Peace Hotel  aurait presque des allures de vacances balnéaires sans les croissants et sans la plage. A l’Evening View Lodge la patronne me reconnaît et nous interpelle pour un thé. Pema Dorje, son mari, est très impliqué dans la vie locale. Il explique que le gouvernement népalais envoie pour le village sept instituteurs n’enseignant que le népali. Lui recherche activement des volontaires internationaux pour l’enseignement de l’informatique et de l’anglais. Internet est en effet monté jusqu’à Thulo Syabru. Nous constatons ensemble que le trek au Népal n’est plus ce qu’il était : Pema Dorje déplore le peu de touristes cette saison : «  Where is the money ? ».

Un très agréable sentier balcon dans les arbres conduit en 3 heures et sans effort à Thulo Bharku, qui est désormais au bord de la route. Puis au prix de 2 heures de poussière, nous clôturons notre trek, crépis, à Dhunche ( 1960) où se tient un grand rassemblement populaire, forcément en notre honneur !! : vedettes pop, chansons à l’eau de rose comme on les aime, folklore, surprise et l'anachronisme total.

                                             J11 : LE BUS EST UNE BOITE DE NUIT

 

Le jus de nos chaussettes est plus foncé que le café du matin : il est grand temps de rejoindre la capitale. Le bus est une boîte de nuit : le contact démarre l’autoradio. A fond.

Nous voilà secoués comme dans un crêp’shaker, inondés de musique pop népalaise ( la même qu’hier soir ). A chaque nid de poule, on reçoit le voisin, tout sourire,  sur les genoux. Les Népalaises sont belles, de rouge et de doré vêtues, maquillées élégamment, impassibles dans ce bain de poussière, et debouts souriantes dans l’allée centrale les 3 heures qu’il faudra pour relier Dhunche à Trisuli où elles descendent. Pause dal bhat toujours aussi rapide, et on repart sur le même rythme pour 4 heures encore. Il faut être endurant.

Installation à la maison chez Mingma, la douche, le shampoing, le yaourt, les mangues, les gentilles attentions de Malla, et tout et tout.

 

Cathy Caudart 

 05100 Briançon

05neiges@gmail.com     

06 47 90 33 91

 

Et cet hiver, envie de glisses sauvages avec Cathy ? 

http://www.randhautnordique.com/