NAR PHU JUILLET 2016

Mon retour au Népal après une trêve de quatre années s'est présenté comme un sketch savamment organisé grâce à un casting parfait : les principaux protagonistes étaient absents.

Nous sommes hors saison. Pas d'accueil comme prévu à l'aéroport. J'attends, je scrute l'horizon, les panneaux des agences, puis finis par demander de l'aide aux autres guides Népalais, rares, des autres agences, rares, mais qui tous ont la faculté de manier le portable aussi copieusement que moi, le balai.

Le premier, au bout de plusieurs tentatives d'appels à l'agence, fermée à cette heure, m'avoue qu' un corps l'attend pour la crémation, et me laisse dans les mains, plutôt sur le portable d'un autre. Il me laisse sa carte, au cas où … Où quoi ?

Le second, lui, après plusieurs tentatives, me quitte avec son groupe au complet et son chauffeur, le bienheureux, me souhaitant bonne chance.

Un chauffeur de taxi plus opiniâtre que les autres a finalement raison de mes arguments cartésiens, et décide de me conduire à mon hôtel, et on téléphonera plus tard. Là je retrouve un pays complètement délabré, tandis que j'avais quitté un des pays les plus pauvres du Monde : les rues de Bodnath sont impraticables dû à la boue qui forme des ornières impressionnantes, toutes les tuyauteries ont souffert du séisme d'il y a 18 mois. Les habitants rasent les murs, ou plutôt ce qu'il en reste, c'est à dire les tas de briques, certains ayant pris le parti de marcher avec des bottes en dépit de la chaleur ( les écoliers) , d'autres ont ôté leurs chaussures et piétinent dans la boue copieuse ( les porteurs et marchands).

Il nous faudra pas moins d'une heure trente ( 6 kms) à tourner en rond pour localiser la nonnerie Dendrup que personne ne connaît mais que chacun insiste à situer dans un détour de chemin improbable.

Car l'agence qui enfin a répondu, m'apprend que mon hôtel favori étant complet, je logerai à proximité. On m'a réservé, sans me connaître, une nonnerie. Prémonitoire  ? Obligatoire ?

Peu à peu je retrouve mes habitudes, mais pas « mon » cordonnier, qui a probablement quitté son coin de rue pour un autre, au sec.

Je vais manger un plat de légumes fris au resto tibétain, ce qui me permet de vérifier que les coussins ont quatre ans de crasse de plus qu'il y a quatre ans. Le thé est toujours aussi particulier, sous le portrait du Dalaï Lama qui inlassablement veille sur les étranges ingrédients de l'incomparable wangzi.

Puis pour le café il faut chercher, et il faut de l'électricité. Alors je teste une autre terrasse avec vue sur le stupa en rénovation, ou en démolition, ou en construction, en tout cas recouvert d'un réseau des bambous ébouriffés en échafaudage.

C'est la mousson : j'achète un parapluie dont on m'assure qu'il ne fera guère plus de 2 ou 3 jours, c'est la règle « made in China ». Je vais lui en demander 23.

Ce soir depuis la nonnerie je suis aux premières loges, non pas pour le feu d'artifice, mais pour les incantations qu'elles s'époumonent à lancer vers le ciel. J'espère que la nuit, elles dorment enfin, les nonnes, car ce matin elles s'époumonaient sur le balcon en se poursuivant avec des boulettes de papier mâché, tandis que j'essayais de récupérer de ma nuit blanche dans l'avion.

 

Boudha mon ami, aide moi s'il te plaît pour la suite.

                                                                               J1

6 / 7 / 2016

Aujourd'hui c'est l'anniversaire de Sa Sainteté le Dalaï Lama, me chuchote – t-on à l'oreille. Mais est-ce cela qui justifie la présence de la Police Népalaise en grand nombre dans les rues de Bodnath ? Il semblerait que oui, me chuchote-t-on toujours. Je finis par comprendre quand le réceptionniste de la Guest House m'explique que depuis peu la communauté tibétaine en exil n'a plus le droit de festoyer en public pour l'anniversaire de son maître spirituel, le gouvernement Népalais dans le souci de respecter les susceptibilités de la Chine ayant interdit toute manifestation de joie dans le pays. Bodnath étant la plus grande concentration de réfugiés Tibétains au Népal, est aujourd'hui sous contrôle : matraques, casques, mitraillettes, boucliers. Pas longtemps.

Une heure ou deux après s'être installés autour du stupa et aux portes des monastères, la Police s'assoupit, regarde passer les filles, déjeune dans les petits restos tibétains, et la vie reprend son cours ! Sans festivités cependant.

Tenzig Gyatso a 82 ans aujourd'hui, happy birthday ! La fête se fera dans les familles, les Tibétaines se sont parées de leurs plus beaux atours, et on a toujours le droit de tourner tourner tourner autour du stupa. En silence.

Il y a plusieurs années j'avais ici assisté à l'anniversaire de la naissance du Boudha, sa représentation était promenée autour du stupa sur un camion décoré à la façon d'un sapin de Noël, il était encore permis de fêter l'évènement en public.

 

 

                                     J2, libre à Bodnath, rando pour Kopan Gompa.

                                                                              J4

Bodnath à Besisahar ( 950m ) en bus, 6 heures de route le long de la Budhi Gandhaki, littéralement «  la vieille rivière » et 2hs à pieds pour Bhulbule. Nos porteurs évaluent les charges, ficellent consciencieusement les paquetages, et nous voilà partis pour le hors d'oeuvre : 2hs de marche pour rejoindre Khudi / Bhulbule. Les Népalais, pour certains, préfèrent deux heures de route défoncée et nous croisons quelques bus locaux autant colorés que brinquebalants.

La soirée et la nuit nous offrent le spectacle type de la pluie de mousson, continue, inébranlable, lourde et … sourde à tous mes désirs de la voir s'arrêter.

 

                                J5, de Khudi ( 840m) à Syangje ( 1100m) en 5h30

 

Ici plus qu'ailleurs, la Chine phagocyte. Les Chinois construisent une usine hydroélectrique sur le torrent bouillonnant. « Viens au travail dans la joie, rentre chez toi en sécurité, ne viens jamais sous l'emprise de l'alcool, etc »

Les buffles, eux, se moquent bien des recommandations des Chinois, ils se contentent de prendre le frais sous leurs abris de bambous, avant d'être utilisés pour le labour. Le riz a déjà été repiqué dans la plupart des rizières, de petites à minuscules, inondées.

La route en éternelle construction emprunte la rive droite du torrent, tandis que nous longeons la rive gauche, traversant des hameaux de poupées, fleuris, où nous sommes les seuls trekkeurs à cette saison.

17h, la Marsyangdi s'est resserrée. C'est l'heure du rendez-vous avec la pluie. Mais nous avons rejoint notre étape du soir dans le nouveau hameau de Syangje, au pied d'une falaise moussue et c'est depuis la fenêtre du lodge que nous saisissons en image l'expression «  un rideau » de pluie.

                   J6, de Syangje ( 1100m) à Dharapani ( au lieu de Tal, qui était prévu ) en 7h

 

Une longue étape aujourd'hui, qui ne s'avérera pas nécessaire.

Jagat ( 1300m) tire son nom d'une barrière de péage qui date de l'époque du commerce du sel. C'est le village le plus au sud du district de Manang, district qui compte aussi les vallées de Nar et de Phu. Nous pénétrons le territoire montagnard, et désormais nous rencontrerons plus de Gurungs que de Newars ou autres ethnies des basses terres. De Jagat, il nous faudra pas moins de 4 heures pour rejoindre le long replat de Tal ( «  lac » ), et sa porte d'entrée surmontée des trois protecteurs du boudhisme : Avalokiteshvara, Mansjuri, et Vajrapani.

Nous aurions pu dormir à Tal comme prévu, mais notre équipe préfère pousser jusqu'à Dharapani ( « robinet d'eau ») en 2h15, sûrement pour une bonne raison, mais qui m'échappe.

 

 

                                              J7, de Dharapani à Koto ( 2600m) en 4h

 

Notre dernière journée sur l'autoroute des Annapurnas sera une étape courte. Nous coupons les lacets de la future route, qui est pavée par endroits, et dont les raccourcis sont balisés rouge et blanc façon GR ! Nous déjeunons en Suisse, euh non … à Timang ! Là les hommes s'activent dans les potagers. En fait, les hommes ici sont des femmes. Ici comme ailleurs.

Moutarde jaune, choux, oignons, pommes de terre, pommes, tout est biné, buté, nettoyé.

A Koto, douche chaude au gaz, tapis et grosses couettes, nous profitons d'un confort que l'on doit à la route, et que l'on ne devrait plus retrouver par la suite. Le groupe part «  en ville » c'est-à-dire à l'unique boutique, négocier du papier toilette, en prévision de la pénurie des jours suivants.

Au-dessus de ma tête, un poster de l'ascension du Himlung Himal en 2015, par une expé française bien connue, est là pour me ramener vers d'autres souvenirs...

                               J8, de Koto ( 2600 m) à Méta ( 3560 m) en 7h30

 

Au-delà du check-post, nous sommes dans la « restricted area ». Nous longeons le torrent de Phu où de nombreux ouvriers s'activent à découper des planches dans les arbres, planches qu'ils transporteront jusqu'à Méta, une charge de pas moins de 60kg.

Après 3hs de marche le long de ce torrent bruyant, pause thé au tea-shop minimaliste et improbable de Chaucha, dans lequel on s'entend à peine parler. Chut ! Le torrent. La patronne ne doit pas voir passer beaucoup de trekkeurs, car elle demande à notre guide combien elle peut nous facturer le thé !

Trois heures après, à Dharmasala ( 3210 m) l'espace est peu engageant, humide, toujours bruyant, jonché de détritus. Nous passons donc notre chemin.

Encore 1h30 jusqu'à Méta (3600 m). Depuis mon dernier passage, Méta s'est développé, il y a trois lodges désormais ouverts ( c'est la saison du yarsa gumpa), et le réseau téléphonique. Curieusement, il n'y a aucun enfant à Méta, seraient -ils tous à l'école monastique de Nar Phédi ?

Le Shambala lodge nous accueille pour la nuit. Du balcon, j'observe les va-et-vients. On pourrait tourner : «  Un été à Méta », tant le spectacle humain est extraordinaire, tout en étant très ...ordinaire. Un groupe de 5 à 6 Tibétains de Nar discutent ferme, penchés sur la carte des propriétés foncières. Le texte est en tibétain, et leur discours m'est incompréhensible : c'est le dialecte de Nar / Phu, m'explique Didi. Tous portent des chapeaux décorés de fleurs des champs comme pour une kermesse. Ils sont arrivés à dos de mules, elles aussi décorées. Je m'approche et ose un œil sur la carte. Ils portent aussi, c'est confirmé, une forte odeur de chang, de sueur et de feu. La Didi du lodge, une agréable maîtresse femme, finit par se mêler de l'affaire et la cours du lodge prend des allures de cours de justice. Le document est inspecté, discuté, roulé sur lui même puis redéployé. Il semblerait que tous soient tombés d'accord puisqu'ils rentrent enfin boire un verre, et probablement pas de thé.

Dans les champs alentours, la toxique jusquiame est omniprésente et supplante le rumex. Des khampas au turban rouge lancent des cris en direction de leurs yacks juste rentrés de l'alpage, Didi téléphone en hurlant, c'est qu'elle doit téléphoner loin, et avec une gestuelle à l'italienne. Les poules lavent la vaisselle. Mon groupe se repose dans la plume. Nous nous apprêtons à passer notre première nuit au-delà de 3500 m.

Tout est bien dans l'ordre du monde.

 

                                     J9, de Méta ( 3560 m) à Kyang ( 3840 m ), 4 heures.

 

Métha à Jhunum ( 3640 m ) 2h / Jhunum à Chyako ( 3750 m) / Chyako à Kyang ( 3840 m)

Comme Méta, les hameaux abandonnés de Kyang et Chyako étaient peuplés de Khampas, guerriers Tibétains, jusqu'en 1975 date à laquelle l'armée les a chassés. Depuis ils se sont installés de l'autre côté de la frontière. Quelques familles de Phu viennent y passer l'hiver quand la neige est trop abondante chez eux.

 

Aujourd'hui nous longeons d'extravagantes moraines glaciaires . Le sentier nous conduit en deux heures, dans les odeurs d'ail sauvage, à Jhunum, autre hameau abandonné, puis à Chyako où un lodge rustique ouvre en saison.

Enfin Kyang, un lieu magnifique pour installer le camp, même si la plupart des bâtisses sont effondrées. Leurs petites ouvertures ont été fermées pour l'hiver par des pierres empilées, et leurs portes sont closes par de minuscules cadenas, et surmontées de « gris gris ». Des familles de Phu, propriétaires à Kyang, embauchent des Népalais du sud pour reconstruire leurs biens en pierre et bois, probablement en prévision de création de lodges.

 

                                           J10, de Kyang ( 3840 m) à Phu ( 3960 m)

 

Aujourd'hui est un grand jour : c'est le 14 juillet en France, et c'est le jour où nous atteindrons Phu, le village du bout du bout, plein nord direction le Tibet qui n'est plus qu'à 8 kms à vol d'oiseau.

La montée de Kyang à Phu est un voyage dans l'univers minéral des hautes vallées. Ce voyage commence dans un corridor, dans lequel est taillé un sentier à flanc de falaise quelques 100 mètres au-dessus de la Phu Khola. Il est ponctué de chortens et de tours de guet ruinées, nécessité de se défendre de l'envahisseur. Seul trait d'union avec le reste du monde, il alterne escaliers de pierre, traversées d'éboulis hasardeuses, parfois effondrées, qui signent une union … fragile. Des moraines sans âge à taille himalayenne, des roches de tout acabit suspendues aux montagnes comme par miracle.

Phu est un miracle. Soixante dix personnes vivent ici dans ce lieu hors du Monde, perpétuent les rites tibétains du bouddhisme, élèvent des yacks, cultivent l'orge, font sécher l'ail sauvage, ramassent les précieux «  yarsa gumpa », font des fumigations de genévrier, et se retournent sur le passage des 5 uniques trekkeurs que nous sommes, hors saison touristique.

A notre arrivée, toutes les portes sont fermées. On apprend que les locaux sont à la grande puja au monastère de Tashi Laprang. Pas facile de trouver la didi du lodge dans ce dédale de ruelles lilliputiennes, d'autant plus qu'elle aussi, est à la puja. Je sillonne le village avec Dawa qui court devant, empressé de satisfaire ma demande : trouver le lodge le plus sympa, sachant qu'il n'y en a que deux, et que sa propriétaire a mis la clé sous la porte le temps de la cérémonie. Les maisons sont hautes, certaines à trois étages reliés par des échelles faites de troncs creusés. Sur les toits plats sèchent le genévrier, le linge, l'ail, les champignons, les baskets.

Nous montons nous aussi au monastère de Tashi Laprang, on s'y voit offrir le thé au beurre rance et les ti-momos à la vapeur, on est dans le film, le moral est au beau fixe.

Que le ciel nous soit clément demain.

 

                             J11, acclimatation à Phu, balade vers le CDB du Himlung Chuli.

 Une journée à Phu, c'est comme un grand spectacle.

Le réveil nous offre la surprise de quelques sommets glaciaires insoupçonnés la veille : le Namjung Himal au sud, à l'accès interdit, et au nord les contreforts du Chyaku ( «  le couteau » ).

Nous laissons plein nord la direction du Tibet qui n'est plus qu'à deux ou trois journées de marche, et nous prenons la direction de l'est. La faune sauvage n'est dérangée par personne : hardes de moutons bleus peu farouches, rapaces, et Tashi me parlera aussi du léopard des neiges, aperçu parfois à proximité du village.

Depuis le toit du lodge j'observe les allers et venues. Un homme décharge ses trois mules et lance les paquetages depuis le bas vers le toit terrasse du premier étage. Manqué ! Encore manqué ! Une vieille dame vient à sa rescousse, et fait des montées descentes des escaliers avec les paquetages sur le dos, de quoi entretenir les articulations . L'homme persiste à essayer de lancer depuis le bas …

Pendant ce temps, dans les jardins une jeune femme en tenue européenne, pantalon moulant et polaire saillante, bine les « sags » ( seul légume qui accepte de pousser ici, avec l'orge ) avec un ustensile au manche très court. Son bébé gazouille dans les bras du papa, au bord du potager.

Les habitants de Phu se contentent pour toute nourriture de farine d'orge grillée mélangée à de l'eau, des éternels « sags » et de quelques pommes de terre en saison. Les œufs arrivent, ou pas, à dos de porteurs, avec les pâtes déshydratées et les fioles d'alcool fort hors de prix pour le pays.

Tashi s'active à la cuisine pour nous préparer le repas du soir. Chargée de deux jerricans d'eau glacée, elle fait des allers venues à la fontaine, qui n'est pas tout proche. Son lodge minuscule est bien tenu : plancher à lattes larges, éléments de cuisine bien rangés, et le petit temple domestique avec la photo du Dalaï Lama derrière les sept bols. Elle a refusé plusieurs demandes en mariage et vit seule à 40 ans dans cet univers beau mais hostile. Elle passe l'hiver à Kathmandu avec ses deux sœurs. Une photo les présente toutes les trois, belles, riantes, coquettes. Nous allons tôt nous coucher dans nos petits espaces.

Ce soir restent les éléments : la terre, le ciel, et l'eau.

 

                                                              J12, Chyako ( 3720 m )

 

Nous revenons aujourd'hui sur nos pas jusqu'à Chyako en 3h45 de marche, dans un paysage maintenant connu. A ne contempler que l'immense prairie, les fleurs, le ciel, les falaises abruptes, on se croirait dans un alpage suisse. Un couple sympathique et débrouillard y a ouvert un tea shop dans lequel nous prendrons nos repas. Ils me montrent leur récolte : quelques brins de Yarsa gumpa , pas encore de quoi faire fortune même si le prix de vente est exorbitant. Leur fils est à Kathmandu, leurs deux filles à Pokhara, pour leurs études. De temps à autres ils descendent leur rendre visite au prix de quelques heures de marche, et de non moins longues heures de bus. L'an prochain, ils agrandiront pour proposer quelques chambres. Madame me fait goûter une herbe amère dont elle se régale, et monsieur sourit devant ma mine déconfite.

                                   J13, de Kyang à Nar ( 4200 m) via Nar Phédi en 6h

 

Nous redescendons encore un peu la vallée pour traverser le torrent et remonter en face vers les toits rouges de Nar Phédi où nous déjeunons. Le site est enchanteur, placé comme une offrande au confluent de deux torrents de géant. Il est aussi beau que le repas y est simple : soupe de nouilles instantanée ou soupe de nouilles instantanée. Douze moinillons étudient ici. Une beauté Népalaise de seize ans, autrement dit une femme, fait ici l'équivalent de son service civique. Elle vient de réussir le SNC ( le bac) et enseigne aux douze enfants l'anglais, les maths, et le népalais. Un moine enseigne les matières religieuses. Un célibataire de Koto est le maître de cette maison, il gère la logistique, le ravitaillement, aidé dans sa tâche par une jeune maman à la cuisine, et par une vieille mendiante qui donne un coup de main au ménage. C'est la jeune institutrice qui me raconte tout, saisissant l'occasion de discuter avec des étrangers.

La gompa appartient à l'ordre des Kaguy Pa, et le Karma Pa figure un peu partout en photo avec le Dalaï Lama. Cette gompa est liée à celle de Namo Boudha dans la vallée de Kathmandu.

Après la soupe de nouilles, il nous faut monter 2h30 pour atteindre le chorten au toit en bois qui marque l'entrée de Nar.

De loin, le village apparaît bien plus développé que Phu, on y cultive des légumes dans des serres.

On s'arrête au Kang La Lodge au début du village.

                                                  J14, acclimatation à Nar ( 4200 m 

 

Tôt le matin, le Pisang Peak ( 6091 m ) se dégage au sud, le Kang Guru ( 6981 m) à l'est.

Dans le village chacun vaque à ses occupations. Certains transportent des blocs de pierre sur des claies pour la construction de la nouvelle gompa, les vieilles femmes tournent leur moulin à prières, certains rangent les stocks de bouses séchées pour le poêle.

Quelques longues heures dans le duvet, c'est un peu le quotidien de l'altitude. Il faut bien les faire passer, alors je dévore les ouvrages apportés par le groupe, brume dehors, brume dedans. Le staff, lui, joue aux cartes sur la pelouse humide.

Ramsing notre porteur malade, est finalement redescendu seul. « Doctor » l'a soigné du mieux possible, mais il lui faut redescendre vers l'étage des hommes, des sangsues, et de l'hôpital.

La matinée est consacrée à une rando pour le moins vallonnée qui nous ouvre les portes d'une longue vallée menant au Téri La puis au Mustang.

 

 

                             J15, de Nar ( 4200m ) au Kang La Phédi ( 4400 m)

 

Nous remontons d'immenses alpages, de yacks, de dris avec leurs petits, de chevaux, et de moutons. La végétation est rase : pédiculaires violet foncé, anémones blanches, géraniums roses. Il y a autant de chaussures échouées ici que dans la baie de la baleine en Norvège ! Ici l'océan n'y est pour rien. A croire que les bergers arrivent chaussés et redescendent pieds nus.

18h30, repas au CDB, cuisiné avec amour et dans la boue. C'est aussi l'heure où l'alpage se referme sur lui même pour s'enfermer dans le silence. On pourrait presque, d'ici, attraper les étoiles.

Demain, le col.

 

                              J16, du Kang La Phédi ( 4400 m) à Ngawal ( 3660 m)

 

900 m D+ et 1600m D-

La météo nous fait faux bond pour le passage du col : il pleut ! Les sommets se cachent derrière des brumes épaisses qui se déplacent par wagons dans des directions opposées en fonction de l'altitude. L'aérologie ici relève pour moi du mystère.

Il nous faudra moins de trois heures ce matin pour rejoindre le point culminant de notre périple, le Kang La, évalué 5320 sur les cartes, et 5150 sur mon alti. La descente est raide et longue jusqu'à Ngawal, 4 heures. Ce vieux village bouddhiste du district de Manang entre dans l'ère du monde moderne, pour le meilleur et pour le pire. Nous logeons dans une verrue au milieu du hameau. Rêve mégalo d'un retour d'immigration aux USA ou aux Emirats ou ailleurs ? 25 % de l'économie du pays provient du travail des Népalais hors de leur nation. « Shanti » signifie paix, et ça me plaît, tant pis pour la verrue. Le «  Shanti lodge »  nous accueille dans des conditions de confort inespérées. Le vent se déchaîne, les drapeaux prient comme jamais, mais dedans les couettes sont moelleuses. Au demeurant très appréciée, la verrue côtoie le chorten bön au toit en bois et les maisons blocs de pierre fondues dans le milieu. Deux époques cohabitent.

                             J16, de Ngawal ( 3660 m ) à Koto ( 2600 m ) en 7h

 

Ngawal à Sawargadwari Bridge en 5h30

Déjeuner au pied de la « falaise du paradis ».

Mudré a décidé d'y aller en voiture ! c'est vrai que c'est moins fatigant qu'à pieds. 

                               J17, de Koto ( 2600 m ) à Tal ( 1700 m ) en 6h

 

Koto à Dharapani en 4h de ups and downs, puis 2h pour Tal

                                               J18, de Tal ( 1700 m ) à Bulbule

 

Nous retrouvons l'étage des rizières, des cultures, et les images de la vie quotidienne.

Remise des remerciements à l'équipe.

J19, de Bulbule à .... Bhaktapur

 

Encore un petit effort de 2h le long de la route en construction, on repasse devant l'usine chinoise, la température nous accable après ce séjour en altitude. Puis bus affrété pour Bhaktapur.

A Bhaktapur, déesses ébranlées et démons de guingois, le séisme a signé son passage. Depuis le 25 avril 2015, la verticale n'est plus perpendiculaire à l'horizontale. Il faut pencher la tête pour contempler les pagodes et ce qui tient encore tête au ciel est soutenu par des étais. Les piles de briques s'amoncellent, dans l'attente.

 Cathy Caudart 

 05100 Briançon

05neiges@gmail.com     

06 47 90 33 91

 

Et cet hiver, envie de glisses sauvages avec Cathy ? 

http://www.randhautnordique.com/